La charte d'Appleton
pour la protection et la mise en valeur de l'environnement bāti
Publiée par le
comité anglophone d' ICOMOS Canada
Ottawa, Ontario, Canada
Août 1983
A. Préambule
L'existence de la présente charte est étroitement reliée
à la reconnaisance de la
Charte internationale sur la conservation et la restauration des monuments
et des sites (Venise 1964), la
Charte pour la conservation des sites d'importance culturelle (Charte
de Burra, ICOMOS Australie, 23 février 1981) et la
Charte pour la conservation du patrimoine québécois
(Déclaration de Deschambault).
La charte reconnaît également que la gestion saine de
l'environnement bâti constitue une activité culturelle
importante et que la conservation est un élément essentiel
du processus de gestion.
B. Cadre
L'intervention au sein de l'environnement bâti peut se manifester
à plusieurs niveaux (de la conservation au redéveloppement),
sur plusieurs échelles (d'un élément de bâtiment
à l'ensemble d'un site) et se caractérise par une ou plusieurs
activités allant de l'entretien à une addition.
Bien qu'un projet puisse combiner divers niveaux, échelles
et activités, les projets doivent être définis par
des objectifs bien précis en fonction desquels les décisions
à petite échelle peuvent se mesurer.
Pour décider du niveau approprié d'intervention, une
étude approfondie des qualités suivantes s'impose :
importance culturelle
état et intégrité
de la structure
valeur contextuelle
utilisation appropriée
des ressources matérielles, sociales et économiques
disponibles.
Les décisions concernant l'importance relative de ces facteurs
doivent résulter d'un consensus aussi large que possible. Un
consensus légitime nécessite la participation du public
et doit précéder le début des travaux.
Les rapports entre les échelles, niveaux et activités
d'intervention sont résumés ci-après.
Activités
Niveaux d'intervention: |
Entretien |
Stab. |
Enlèvement |
Addition |
Conservation |
x |
x |
|
|
Restauration |
x |
x |
x |
x |
Réhabilitation |
x |
x |
x |
x |
Reconstruction |
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x |
Redéveloppement |
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x |
Échelles d'intervention
Niveaux
d'intervention: |
Partie
d'édifice |
Édifices |
Ensembles |
Édifices
& zone protect. |
Sites |
Conservation |
x |
x |
x |
x |
x |
Restauration |
x |
x |
x |
x |
x |
Réhabilitation |
x |
x |
x |
x |
x |
Reconstruction |
x |
x |
x |
x |
x |
Redéveloppement |
x |
x |
x |
x |
x |
Niveaux d'intervention
Conservation :
Maintien des formes
et des matériaux existants, et de l'intégrité
du site.
Restauration :
Rétablissement
des formes et des matériaux anciens, et de l'intégrité
du site.
Réhabilitation :
Modification
d'un bien selon des normes contemporaines, ce qui peut entraîner
une adaptation du bien à un nouvel usage.
Reconstruction :
Reconstitution
des biens disparus ou irréversiblement détériorés.
Redéveloppement :
Insertion
de structures ou d'additions contemporaines compatibles avec le site.
Activités
Entretien :
- Activité constante pour assurer
la longévité du bien sans intervenir de façon
irréversible ou dommageable.
Stabilisation :
- Activité périodique destinée
à stopper la détérioration et à équilibrer
les formes et les matériaux existants avec un minimum de modifications.
Enlèvement :
- Activité périodique qui
modifie le bien par le retranchement de surfaces, de couches,
de volumes ou d'éléments.
Addition :
Activité
périodique qui modifie le bien par l'addition de nouveaux matériaux.
C. Principes
Le respect de la structure est essentiel aux activités de protection
et de mise en valeur.
Le processus de protection et de mise en valeur doit tenir compte
de toutes les personnes intéressées et faire appel à
tous les domaines d'expertise susceptibles de contribuer à l'étude
et à la sauvegarde d'un bien.
Les mesures appuyant la protection et la mise en valeur de l'environnement
bâti lors d'interventions effectuées aux échelles,
niveaux et activités décrits plus haut, exigent l'adhésion
aux principes suivants:
Protection :
La protection peut nécessiter la stabilisation; elle doit comprendre
un programme d'entretien constant.
Valeur des artefacts :
Les sites de grande importance culturelle doivent être considérés
avant tout comme des artefacts et doivent être protégés
en tant que monuments historiques fragiles et complexes.
Sites :
Tout élément de l'environnement bâti est indissociable
de l'histoire dont il témoigne et du site où il se trouve.
Par conséquent, toute intervention doit s'adresser à l'ensemble
autant qu'aux parties.
Déménagement :
Le déménagement et le démembrement d'un bien ne
doivent être effectués qu'en dernier ressort, si aucun
autre moyen ne peut en assurer la protection.
Mise en valeur :
Le retranchement ou l'addition d'éléments caractérisent
les mesures qui appuient la mise en valeur d'un bien culturel.
Utilisation :
Le bien doit être utilisé pour les fins auxquelles il a
été originellement destiné. Si cela s'avère
impossible, des efforts doivent être faits pour trouver des fonctions
compatibles exigeant un minimum de modifications. Lorsqu'une nouvelle
utilisation est envisagée, il faut d'abord respecter le plan
original de circulation et de distribution des espaces.
Additions :
Les nouveaux besoins ou les nouvelles utilisations peuvent exiger l'emploi
de nouveaux volumes, matériaux ou finis. Ils doivent également
refléter les idées contemporaines tout en respectant et
en mettant en valeur l'esprit du bien original.
Climatisation :
Les systèmes d'isolation, de climatisation et autres services
doivent être améliorés de façon à
respecter l'harmonie existante et traditionnelle du bien, sans toutefois
engendrer des processus de détérioration.
D. Pratique
Documentation :
Plus un bien est compris et interprété, plus il est
protégé et mis en valeur.
Pour bien comprendre et interpréter un site, il faut rechercher
toutes les qualités qui donnent à un bien son importance.
Cette activité doit précéder les travaux sur le
chantier.
La documentation et les relevés doivent faire partie des travaux
de chantier.
Conjecture :
Les activités qui nécessitent le rétablissement
ou la reconstitution de formes anciennes doivent se limiter aux formes
qui peuvent être exécutées sans conjecture.
Distinction :
Une inspection minutieuse ou un oeil averti doit pouvoir distinguer
les nouveaux travaux, mais ceux-ci ne doivent pas altérer l'intégrité
esthétique ou la cohérence de l'ensemble.
Matériaux et techniques :
Les matériaux et les techniques utilisées doivent respecter
les pratiques traditionnelles, à moins qu'il ait été
prouvé scientifiquement que les substituts modernes sont plus
avantageux.
Patine :
La patine fait partie de l'intégrité historique d'un
bien, et sa destruction ne doit être admise que lorsqu'elle est
essentielle à la protection des constituants. Il faut éviter
de créer un patine artificielle.
Réversibilité :
Il est toujours préférable d'utiliser des techniques
réversibles pour permettre un plus grand choix de développements
futurs ou de corrections en cas de problèmes imprévus,
ou lorsque l'intégrité du bien risque d'être affectée.
Intégrité :
L'intégrité structurale et technologique du bien doit
être respectée et nécessite de l'attention tant
au niveau de l'exécution qu'au niveau de l'apparence.