Les Théâtres et les Amphithéâtres antiques

 

Par Jean-Charles Moretti, 1999
IRAA du CNRS, Lyon, France


I.  L'histoire du théâtre antique

Les édifices à gradins de la Crète minoenne mis à part, l'architecture théâtrale semble apparaître en Grèce dans le courant du VIe. s. av. J.- C., à l'époque où sont institués le programme des grands concours religieux et les règles de leurs épreuves. Dans le même temps furent sans doute créés trois types monumentaux pour recevoir les trois types d'épreuves distinguées par les Grecs. Les épreuves hippiques prenaient place dans l'hippodrome, les épreuves gymniques dans le stade et les épreuves dites « musicales », car elles avaient partie liée avec les Muses, dans le théâtre. Les édifices de spectacle du VIe s. accueillaient les spectateurs sur des gradins de bois, montés sur des échafaudages. Ils sont connus par des textes et par des représentations sur des vases. Les plus anciens vestiges de théâtres retrouvés remontent au Ve s. et se répartissent dans la péninsule hellénique entre la Béotie et le Nord-Est du Péloponnèse en passant par l'Attique. Tous les théâtres de Grèce ont en commun certaines caractéristiques. Leurs koilons sont adossés à des éminences naturelles, taillées ou aménagées pour l'occasion et si nécessaire complétées par des remblais que peuvent contenir des murs de soutènement. Les gradins de pierre, quand ils existent, prennent la forme de simples degrés, avec une face antérieure et un lit supérieur plans. Dans plusieurs édifices, seul le premier rang est occupé par des trônes derrière lesquels un terrain déclive accueillait les spectateurs assis par terre ou sur des bancs de bois. La partie centrale du koilon est toujours composée de gradins rectilignes. Parfois, elle est complétée par deux ailes de gradins qui, vers leurs extrémités antérieures, divergent par rapport à l'axe du monument. Aucun koilon n'est divisé par des circulations horizontales. L'orchestra est de forme allongée, trapézoïdale ou rectangulaire. Elle est accessible latéralement par de larges parodos, qui jamais ne sont obturées par des portes. Nulle part n'a été retrouvé de mur d'un éventuel bâtiment de scène, mais les textes dramatiques conservés ne laissent pas douter qu'il en existait au moins en Attique, construits avec des matériaux périssables. Parmi les édifices qui remontent au Ve s. le mieux conservé est celui de Thorikos (Attique, Grèce), mais le plus important au regard de l'histoire architecturale et littéraire est celui du sanctuaire de Dionysos Éleuthéreus à Athènes.

Une série de gradins rectilignes, taillés dans le rocher, a été trouvée à Syracuse et datée du Ve s. par comparaison avec les dispositifs de Grèce, bien que l'on manque d'arguments pour justifier une datation si haute. À l'époque classique les différents types de spectacles montés dans les théâtres de Grèce étaient connus en Sicile et la Grande Grèce, mais il n'existait pas en Occident de grands concours de musique, de danse et de drame. En l'absence de vestiges d'édifices qui aient pu recevoir ces divers spectacles, on suppose que les représentations étaient données dans des constructions éphémères, comparables à celles représentées sur les vases dits « phlyaques », produits en Italie du sud entre le début et le troisième quart du IVe s. av. J.-C. Ceux-ci portent en effet la représentation de scènes de comédies attiques dans lesquelles les acteurs jouent sur des estrades de bois temporaires. Le recours à un tel équipement invite à croire qu'il n'était pas à cette époque d'édifice en pierre apte à recevoir les représentations.

Il s'en construisit plusieurs à partir de la seconde moitié du IVe s. et tout au long de l'époque hellénistique en Italie méridionale, à Locres et à Métaponte, mais plus encore en Sicile, à Akrai, Héracléa Minoa, Iaitas, Morgantina, Ségeste, Solonte, Syracuse ou Tyndaris, pour ne citer que les théâtres dont les vestiges sont les mieux conservés. Avec leurs koilons à gradins arqués et leurs bâtiments de scène à estrade haute, ils ne sont pas sans rappeler leurs contemporains de Grèce. Dans le détail, cependant, les différences ne sont pas négligeables. Les koilons sont en demi-cercle, mais rarement outrepassés. Le plus souvent les murs de soutènement antérieurs sont parallèles au front du bâtiment de scène. Les orchestras semi-circulaires ont des surfaces relativement réduites. Les parodos sont étroites, car les bâtiments de scène sont généralement proches deskoilons. Les proskènions sont de hauteurs comparables à ceux de Grèce, mais leurs fronts sont parfois murés et décorés d'atlantes ou de caryatides. Leur profondeur est dans plusieurs édifices relativement importante, atteignant 4,50 m et dépassant parfois les 6 m. Le front de l'étage desskènès donnant sur la couverture du proskènion est percé non pas de larges baies, mais de trois portes que les artistes atteignent par des escaliers situés à l'intérieur de la skènè. Dans plusieurs édifices, il est orné de colonnes doriques engagées et surmonté d'une sorte d'attique aveugle, lui aussi orné de pilastres ou de demi-colonnes. De part et d'autre du proskènion, la skènè présente dans plusieurs monuments des avant-corps à étages.

De telles différences morphologiques avec les théâtres de Grèce induisent un type d'utilisation des édifices scéniques en Italie du sud et en Sicile distinct de celui reconnu dans la péninsule hellénique et dans les Cyclades. En Occident, les acteurs jouaient habituellement sur le proskènion et non dans l'orchestra. Les modèles monumentaux mis au point en Grèce au début de l'époque hellénistique ont probablement eu une influence sur l'architecture théâtrale occidentale, mais ils n'ont pas été simplement exportés dans ces régions. Ils le furent en revanche en Orient ou, du moins, dans les grandes cités de la côte occidentale de l'Asie mineure, où furent construits, à partir de la fin du IVe s. av. J.-C., des édifices étroitement apparentés à ceux de Grèce.

Au début du Ier s. av. J.-C. apparaissent en Italie (Tusculum, Pompéi) des bâtiments de scène à estrade profonde (pulpitum) bordée par un front de scène percé de trois portes et orné de colonnes qui se dressent sur des podiums et sont détachées du mur de fond. Ces caractéristiques sont présentes dans le théâtre de type « romain » dont la gestation trouve son terme à Rome avec le théâtre de Pompée, en 55 av. J.-C., et celui de Marcellus, inauguré dans les années 20 av. J.-C. Le théâtre devient alors un édifice unitaire et indépendant du relief naturel. La conque semi-circulaire des gradins est portée par des murs rayonnants surmontés de voûtes, dont la maîtrise de l'opus caementicium facilite la réalisation. Dans cette structure creuse sont ménagés des passages couverts qui desservent les différentes zones de la cavea. Les gradins et parfois des tribunes réservées aux organisateurs des spectacles couvrent les parodos. La cavea est conjointe au bâtiment de scène, la longueur de celui-ci s'assimilant au diamètre de celle-là. Dans certains édifices un portique couronne les gradins. Peu développée, l'orchestra est pavée et reçoit les fauteuils mobiles des dignitaires. Tout le spectacle se déroule dorénavant sur la profonde estrade du bâtiment de scène. Un rideau, qui s'abaisse au début des spectacles, peut momentanément la cacher aux yeux des spectateurs. Derrière lui se dresse le front de scène, un mur dont le sommet règne avec celui de la cavea et qui, à ses extrémités, fait retour vers l'orchestra, définissant ainsi les flancs de l'estrade. Il est orné de placages de marbre, de statues contenues dans des niches et d'un ou de plusieurs niveaux superposés de colonnes dégagées. Derrière le mur de scène se trouvent généralement des vestiaires et des foyers. Les théâtres les mieux conservés du monde romain, ceux d'Orange (France), d'Aspendos (Turquie) et de Bosra (Syrie), portent la trace d'auvents qui couvraient le front de scène et l'estrade. Dans plusieurs monuments les gradins étaient ombragés par les vela, pièces de tissus montées sur des cordes, elles-mêmes fixées à des mâts.

D'une région à l'autre de l'Empire et à l'intérieur d'une même province, des théâtres de formes sensiblement différentes ont coexisté. La plupart des villes qui possédaient des édifices antérieurs au Ier s. av. J.-C. les ont conservés ou en ont seulement modifié le bâtiment de scène. En Asie mineure, où les traditions hellénistiques étaient fortement enracinées, le koilon adossé en demi-cercle outrepassé et le bâtiment de scène à estrade d'une hauteur équivalente à celle d'un proskènion restent fréquents. Le front de scène y est généralement percé de cinq portes alors qu'il n'en comporte que trois en Occident. Il est orné de colonnes implantées parallèlement à un mur de scène rectiligne, tandis que dans le reste de l'Empire des dispositions plus variées avec une ou plusieurs incurvations du mur et de la colonnade sont adoptées dès le Ier s. Dans les provinces d'Aquitaine, de Lyonnaise et de Belgique, le théâtre dit de type gallo-romain associe une cavea adossée, outrepassant souvent en demi-cercle et parfois garnie de gradins de bois, à un bâtiment de scène qui se réduit à une profonde estrade installée dans l'orchestra et à un mur de scène masquant la coulisse.

Apparu pour servir de cadre à des concours et plus généralement à des spectacles musicaux, orchestiques et dramatiques, le théâtre a aussi servi, au cours de son histoire, à d'autres réunions, dont certaines ont nécessité des transformations du bâtiment. Dans les cités de l'Orient grec il a reçu des assemblées politiques. Il a aussi servi, à l'époque impériale, pour des chasses et des combats de gladiateurs aussi bien en Gaule qu'en Orient ou en Afrique. Les gradins ont alors été séparés de l'orchestra par de fortes dénivellations, par des murets ou par des grilles et des filets, tandis que des refuges étaient aménagés pour les chasseurs. Quelques théâtres ont même été conçus dès leur construction pour les spectacles de l'arène. Certaines orchestras ont été transformées en bassins pour recevoir des mimes aquatiques, qui semblent avoir été prisés au IVe s.

II.  L'histoire de l'amphithéâtre antique

L'amphithéâtre, comme son nom l'indique, se présente comme la combinaison de deux théâtres. Il comprend une arène autour de laquelle se développent des volées de gradins. Les édifices de Capoue et de Pouzzoles (Italie), construits à la fin du IIe s. av. J.-C., constituent les plus anciens exemplaires de ce monument, qui avait pour destination première d'accueillir des combats de gladiateurs. L'habitude d'organiser de tels spectacles n'était pas alors une nouveauté : dès le IIIe s. des combats sont attestés lors de funérailles en Étrurie et en Campanie. À Rome même, il s'en disputa pour la première fois en 264 av. J.-C., au forum Boarium, puis à maintes reprises sur le forum lui-même. La place, sous laquelle avaient été creusées des galeries de service, servait d'arène. Des gradins de bois érigés à l'entour recevaient les spectateurs. Apparu tardivement, l'amphithéâtre ne s'imposa pas comme le seul cadre des chasses et des combats de gladiateurs. Le premier amphithéâtre à Rome, construit en 29 av. J.-C., fut longtemps concurrencé par le Forum puis par le Champ de Mars.

À partir du Ier s. av. J.-C., cependant, les amphithéâtres se multiplient. L'arène revêt généralement un plan elliptique, qui est le plus favorable à la perception des spectacles par l'ensemble du public. Elle est accessible par des portes situées aux extrémités du grand axe de l'ellipse et complétées dans certains édifices par des accès sur son petit axe. Sous son sol sont aménagés à partir de l'époque augustéenne des chambres et des couloirs dont certains sont reliés à la surface par des trappes. Des monte- charges hissaient les bêtes destinées aux chasses. Une haute dénivellation couronnée d'un parapet sépare l'arène du public. Comme dans le théâtre, les gradins sont divisés horizontalement par des précinctiones définissant des maeniana et verticalement par des escaliers rayonnants limitant des cunei. Dans les édifices les plus anciens, l'arène était parfois creusée et la cavea était adossée au terrain naturel ou reposait sur du remblai qui, compartimenté ou non, était retenu par un mur à sa périphérie. Les accès aux gradins étaient alors disposés à l'extérieur du monument. Ce mode de construction resta majoritaire jusque dans les années 60 ap. J.-C., mais fut concurrencé à partir de la seconde moitié du Ier s. av. J.-C. par le dispositif à structure creuse adopté dans les théâtres. Des murs rayonnants reliés par des voûtes supportaient les gradins. Des galeries périphériques et des escaliers intégrés à la substructure de la caveaconduisaient à des vomitoires. La façade externe du monument se présentait comme une superposition de un à trois niveaux d'arcades et d'un attique décoré d'ordres engagés.

L'exemplaire le plus grand et le plus élaboré de ces édifices à substructions artificielles fut l'Amphithéâtre flavien de Rome, communément appelé Colisée. Commencé en 71 ou en 72 à l'initiative de Vespasien, il fut inauguré sous Titus par cent jours de spectacles durant lesquels cinq mille bêtes sauvages furent tuées. Le chantier fut achevé sous Domitien après plus de douze années de travaux. Son arène de 79,35 x 47,20 m était comprise dans une cavea de 187,75 x 155,60 m. Quelque cinquante-six rangées de gradins, divisées à l'image des groupes sociaux qui y siégeaient, pouvaient recevoir environ 60 000 personnes. Les premiers degrés recevaient les sièges mobiles des spectateurs de marque. Les derniers, construits en bois, étaient disposés sous un portique. La façade extérieure en travertin se composait de trois niveaux de quatre-vingts travées superposant les ordres dorico-toscan, ionique et corinthien. Un attique à pilastres corinthiens couronnait la construction. Percé de fenêtres et orné de boucliers, il portait les consoles utiles à la fixation des mâts du velum ombrageant les gradins. Un détachement de marins de la flotte était affecté au maniement des cordages de cette immense voilure. Dans son dernier état, le sous-sol de l'arène était entièrement aménagé et relié par un corridor souterrain à la grande caserne de gladiateurs située à proximité de l'amphithéâtre. L'édifice servit de modèle à de nombreux amphithéâtres construits dans l'Empire, sans néanmoins y imposer une uniformité planimétrique. En Gaule, il fut concurrencé par des monuments combinant une arène à une cavea incomplète.

En Occident, l'amphithéâtre fut de la fin du Ier s. au milieu du IIIe s. le signe le plus évident de la romanité et de l'urbanité. En Orient, en revanche, l'amphithéâtre connut une faible diffusion. Dans les pays où la culture grecque était bien implantée, peu d'amphithéâtres furent construits. Les théâtres et les stades furent souvent aménagés pour recevoir les spectacles de l'arène.

III.  Critères proposés pour le classement des théâtres et des amphithéâtres

Les édifices devront répondre à plusieurs des sept critères ci-dessous énoncés. Les quatre premiers s'appliquent à la représentativité des monuments et les trois autres à leurs avantages documentaires :

1 être un représentant insigne de l'un des différents types de théâtres ou d'amphithéâtres qui ont existé dans l'Antiquité
Les différents types de théâtres sont les suivants

Pour les amphithéâtres, on distinguera les édifices complets selon leur plan (oblong, circulaire ou elliptique) et selon leur structure (pleine ou creuse). Les édifices à arène (type Grand, France), où les gradins n'entourent pas l'aire sur toute sa périphérie, ne seront pas négligés.

2  avoir été un modèle architectural

L'évolution de la forme du théâtre et de l'amphithéâtre antique n'a pas été sans ruptures. Certains édifices ont marqué des étapes importantes dans la création des différents types et ont servi de modèles pour la réalisation d'autres monuments : ce fut le cas, à Rome, du théâtre de Pompée, de celui de Marcellus et du Colisée. D'autres édifices, sans avoir peut-être eu une grande importance dans l'histoire de l'évolution des types, demeurent pour nous les rares vestiges qui en illustrent la gestation : c'est le cas, par exemple, des théâtres de Thorikos (Grèce), de Tusculum, de Pompéi (Italie), d'Aphrodisias de Carie (Turquie) ou de l'amphithéâtre de Saintes (France), qui illustre la transition entre les structures pleines et les structures creuses.

3 avoir conservé les vestiges de nombreuses transformations

Certains théâtres ont été utilisés durant près d'un millénaire. Au cours de leur existence ils ont été transformés pour répondre à l'évolution des exigences des spectateurs et à celle des spectacles, recevant successivement les ressortissants de cités indépendantes puis les sujets d'un empire et des oeuvres musicales composées pour des concours puis des chasses ou des combats de gladiateurs donnés en l'honneur de l'empereur. Les vestiges de leurs différents états illustrent l'histoire des sociétés, des formes architecturales et des spectacles. Certains édifices, et en particulier plusieurs amphithéâtres, ont été largement transformés entre la fin de l'Antiquité et l'époque contemporaine. Ces transformations, trop souvent occultées par des restaurations modernes, devront être prises en compte pour évaluer la richesse de l'histoire architecturale des monuments.

4 avoir conservé des vestiges de son environnement antique

Les théâtres antiques se trouvaient généralement dans des villes ou dans des sanctuaires. Ils ont entretenu avec l'agora ou le forum, avec les temples des dieux du panthéon traditionnel ou avec ceux consacrés aux empereurs et avec les autres édifices de spectacle (odéons, stades, amphithéâtres) des relations fonctionnelles dont l'appréhension est nécessaire à la compréhension du rôle tenu par les monuments dans l'urbanisme, dans la religion et plus généralement dans la société antique. On favorisera donc le classement de complexes monumentaux comprenant des théâtres ou des amphithéâtres, plutôt que celui d'édifices isolés de leur contexte.

5 avoir conservé son authenticité

Les théâtres et les amphithéâtres n'ont pas seulement été restaurés au même titre que d'autres vestiges antiques. Depuis le XIXe s. l'habitude s'est prise de les réhabiliter pour recevoir des spectacles modernes. Ces réhabilitations ont souvent été très dommageables car les édifices antiques ne sont pas adaptés aux exigences des spectacles contemporains. Beaucoup ont déjà disparu sous les constructions de gradins et d'estrades modernes, de rambardes de sécurité et d'échafaudages destinés à porter l'éclairage ou la sonorisation. Certains édifices, pourtant bien conservés, ont ainsi été exclus du corpus des monuments pouvant être l'objet d'études scientifiques. Il serait souhaitable que le classement au patrimoine mondial non seulement n'accélère pas les réhabilitations abusives de monuments de spectacle, mais privilégie au contraire les édifices qui soit n'ont pas été restaurés, soit ont été l'objet de restaurations visant à expliciter leurs singularités antiques et non à les gommer par l'adjonction d'un équipement de salle de spectacle moderne.

6 avoir un bon état de conservation général

De nombreux édifices présentent des états de conservation très différents de leurs parties constitutives. Le théâtre d'Épidaure, par exemple, a un koilon remarquablement conservé et un bâtiment de scène dans un état médiocre, alors que celui d'Orange présente au contraire un mur de scène préservé sur 38 m de hauteur et des gradins presque totalement ruinés. On favorisera, autant que possible, le classement d'édifices dont toutes les parties constitutives ont un bon état de conservation : façade périphérique, gradins, circulations ainsi que, pour un théâtre, le bâtiment de scène et, pour un amphithéâtre, les salles de services sous l'arène.

7 être associé à des documents qui font connaître l'histoire de son utilisation

Les monuments ne sont pas seulement connus par leurs vestiges, mais par des documents archéologiques, littéraires ou épigraphiques, qui leur sont associés et qui permettent de préciser l'histoire de leur construction, de leur utilisation et de leurs transformations. On dispose pour certains édifices de comptes de constructions, de dédicaces, d'inscriptions mentionnant des réparations ou des aménagements, de textes, enfin, qui informent sur les spectacles dont ils ont été le cadre. C'est au Colisée que furent données les représentations commémorées par Martial dans le premier livre de ses Épigrammes et dans l'amphithéâtre de Lyon que fut martyrisée Blandine. C'est pour le théâtre du sanctuaire de Dionysos à Athènes, que furent écrites la plupart des pièces d'Eschyle, de Sophocle, d'Euripide et d'Aristophane qui sont conservées et qui sont devenues des oeuvres majeures de notre culture littéraire. Le souvenir de ces divers spectacles devra être pris en compte pour le classement.


Jean-Charles MORETTI Lyon, décembre 1999


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