La procédure de l'ICOMOS pour l'évaluation des propositions d'inscription sur la liste du patrimoine mondial

La procédure de l’ICOMOS est décrite à l’annexe 6 des Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial. Elle est réglementée par les Principes d’application du mandat de l’ICOMOS pour le patrimoine mondial (dernière version révisée en octobre 2012).

Ces principes rendent publique la procédure existante et définissent la façon dont l’ICOMOS conçoit ses attributions liées au patrimoine mondial de façon juste, transparente et crédible, et évite les conflits d’intérêt.

Le travail d’évaluation des propositions d’inscription est coordonné par l’Unité patrimoine mondial du Secrétariat international de l’ICOMOS, en collaboration avec le Groupe de travail pour le patrimoine mondial et la Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS.

Le Groupe de travail pour le patrimoine mondial se compose d’officiers de l’ICOMOS, de l’Unité patrimoine mondial et des conseillers de l’ICOMOS. Il se réunit deux à trois fois par an et est chargé de guider et d’orienter le travail sur le patrimoine mondial.

La Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS, qui regroupe une trentaine de personnes, est constituée des membres du Comité exécutif de l’ICOMOS et d’experts qui sont invités chaque année en fonction de la nature des propositions d’inscription (art rupestre, patrimoine du XXe siècle, patrimoine industriel…). Le TICCIH et DoCoMoMo sont également invités à participer aux discussions ayant trait à leur expertise. La Commission représente les différentes composantes professionnelles, géographiques et culturelles présentes au niveau international. Elle prépare de façon collégiale les recommandations de l’ICOMOS pour toutes les propositions d’inscription.

Ce processus d’évaluation implique une collaboration et une consultation les plus larges possibles tant au niveau des compétences spécialisées que d’un point de vue culturel et géographique, au sein du réseau d’expertise que forme l’ICOMOS.

Pour chaque bien proposé pour inscription, l’ICOMOS évalue :

•     s’il témoigne d’une valeur universelle exceptionnelle :

•     si la protection juridique est appropriée ;

•     si le système de gestion est satisfaisant.

Tous les biens reçoivent une attention égale et l’ICOMOS vise à être aussi objectif, scientifique et rigoureux que possible.

Afin de renforcer la cohérence des évaluations et des recommandations et de vérifier les demandes d’information supplémentaire à envoyer aux États parties, l’ICOMOS utilise une grille de vérification des évaluations et organise une session spécifique avec les conseillers afin de vérifier la cohérence de l’approche de tous les aspects dans l’ensemble des évaluations.

Une évaluation externe des principes, méthodes et procédures utilisés par l’ICOMOS dans le cadre de l’évaluation des propositions d’inscription a été menée en 2009. Le rapport final ainsi que la réponse de l’ICOMOS ont été mis à la disposition du Comité du patrimoine mondial lors de sa 34e session.


1 Travail préparatoire

Le travail préparatoire comporte plusieurs étapes :

a. Étude initiale des dossiers : cette première étape du travail consiste en l’inventaire des pièces du dossier de proposition d’inscription, en l’étude de celui-ci afin d’identifier les différentes problématiques liées au bien et de choisir les experts qui vont être amenés à étudier le dossier, conseillers de l’ICOMOS, experts pour la mission, experts pour les consultations. Une compilation de tous les matériels comparatifs relatifs au bien (listes indicatives, biens déjà inscrits sur la Liste du patrimoine mondial, dossiers de proposition d’inscription, étude ICOMOS « combler les lacunes »…) est préparée afin d’aider le travail des conseillers sur la question des analyses comparatives. 

b. Consultations : des experts sont sollicités pour donner un avis sur l’analyse comparative et la valeur universelle exceptionnelle des biens proposés pour inscription en référence aux dix critères énoncés dans les Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial (juillet 2012), § 77.

À cette fin, l’ICOMOS fait appel aux :

c. Missions d’évaluation technique : l’ICOMOS a pour règle de faire appel à une personne de la région où se trouve le bien proposé pour inscription. Dans certaines circonstances exceptionnelles, liées souvent à la particularité de la nature du bien, il arrive que l’expert ne provienne pas de la même région. L’objectif des missions est d’étudier les critères relatifs à l’authenticité, l’intégrité, les facteurs affectant le bien, la protection, la conservation et la gestion (Orientations, § 78).

Les experts reçoivent une copie de la proposition d’inscription (ou toutes les sections pertinentes du dossier, lorsque celui-ci est particulièrement volumineux), une note avec des questions clés établie suite à une lecture préliminaire des dossiers, une documentation sur la Convention et des instructions détaillées concernant les missions d’évaluation.

Tous les experts ont un devoir de réserve. Leur avis sur la proposition d’inscription ne reflète pas nécessairement celui de l’organisation ; c’est la Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS qui, après avoir pris connaissance de l’ensemble des informations, les analyse et arrête la position de l’organisation.

Des missions sont envoyées pour tous les biens proposés pour inscription, à l’exception des biens renvoyés pour lesquels les Orientations ne prévoient pas de mission (note : en principe, les biens sont renvoyés pour complément d’information et non en raison de modifications approfondies ou substantielles ; les délais impartis par les Orientations ne permettent d’ailleurs pas l’organisation de missions, la préparation d’études de document ou la considération des informations par l’ensemble de la Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS pour les biens renvoyés).

Pour les propositions d’inscription de biens mixtes, les missions d’évaluation technique sont organisées conjointement avec l’UICN. L’ICOMOS et l’UICN échangent également des informations concernant les projets de recommandations pour ces biens. Pour les propositions d’inscription de paysages culturels, l’ICOMOS recueille les commentaires de l’UICN, les intègre dans les évaluations et les prend en compte dans ses recommandations.


 

2 Évaluations et recommandations

a. Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS : des avant-projets d’évaluation (en anglais ou en français) sont rédigés sur la base des informations contenues dans les dossiers de proposition d’inscription, les rapports de mission, consultations et recherches. Ils sont examinés par la Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS lors d’une réunion qui se tient à Paris en décembre chaque année. La Commission définit les recommandations et identifie les demandes d’information complémentaires à adresser aux États parties.

b. Demande de documentation complémentaire : certains biens proposés pour inscription font l’objet d’une demande d’informations complémentaires adressée aux États parties concernés avant le 31 janvier, conformément à la procédure. Tous les documents reçus jusqu’au 28 février sont examinés par le Groupe de travail pour le patrimoine mondial de l’ICOMOS qui se réunit en mars.

c. Finalisation du volume d’évaluation et présentation au Comité du patrimoine mondial : suite à ces réunions, les évaluations sont révisées, traduites dans les deux langues de travail du Comité du patrimoine mondial, imprimées et envoyées au Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO, afin d’être distribuées aux membres du Comité du patrimoine mondial, en vue de sa session annuelle.

Les biens proposés pour inscription et les recommandations de l’ICOMOS sont présentés au Comité du patrimoine mondial par les conseillers de l’ICOMOS grâce à un support Power Point.

En tant qu’organisation consultative, l’ICOMOS donne un avis, basé sur une analyse objective, rigoureuse et scientifique. Toutefois, la prise de décision appartient au Comité du patrimoine mondial. Elle repose sur les membres du Comité et leur connaissance des propositions d’inscription et des évaluations préparées par les organisations consultatives.


3 Le dialogue avec les États parties

L’ICOMOS s’efforce de maintenir un dialogue avec les États parties tout le long du processus d’évaluation des propositions d’inscription, c’est-à-dire suite à la réception des dossiers de proposition d’inscription, pendant et après la mission d’évaluation technique et suite à la réunion de la Commission du patrimoine mondial de l’ICOMOS. La nature des informations demandées est de l’ordre de précisions ou de clarifications, mais n’engendre pas de reformulation complète du dossier de proposition d’inscription.

L’ICOMOS est favorable à ce dialogue. Les réponses apportées par les États parties ont souvent confirmé ou aidé à l’adoption des recommandations finales faites par l’ICOMOS.

Les recommandations de l’ICOMOS sont mises à la disposition des membres du Comité du patrimoine mondial six semaines avant le début de la session. L’ICOMOS est à la disposition des États parties pour discuter et expliquer ses recommandations. Cependant, les contraintes de temps sont un problème et l’ICOMOS est favorable à de plus amples discussions sur la façon d’améliorer ce dialogue.


4 Les biens renvoyés et les demandes de modifications « mineures »

Au 1er février qui précède la réunion du Comité du patrimoine mondial, l’ICOMOS reçoit également les informations complémentaires concernant les biens qui ont été renvoyés lors des sessions précédentes du Comité. Comme indiqué ci-avant, il n’y a pas de missions d’évaluation technique pour ces informations complémentaires. Elles sont examinées par le Groupe de travail pour le patrimoine mondial de l’ICOMOS, lors de sa réunion de mars.

L’ICOMOS examine également les demandes de modifications « mineures » des délimitations, de création de zone tampon et de changement de critères ou de nom de certains biens déjà inscrits sur la Liste du patrimoine mondial.


5 Conclusion

Dans l’élaboration de ses recommandations pour le Comité du patrimoine mondial, l’ICOMOS se base sur les Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial et les conseils du Comité du patrimoine mondial.

Les analyses et recommandations de l’ICOMOS se veulent indépendantes et institutionnelles. L’avis d’un de ses membres n’engage pas l’organisation, les textes des évaluations sont le résultat du travail de 40 à 50 personnes par proposition d’inscription, et s’accompagnent de plusieurs phases d’examens approfondis par des pairs. L’ICOMOS comprend des experts du patrimoine culturel répartis sur les cinq continents et œuvre à la protection de l’ensemble du patrimoine culturel du monde.

L’ICOMOS porte un regard professionnel sur les dossiers examinés et formule, le cas échéant, des recommandations pour tous les biens qui lui sont soumis, indépendamment de la portée régionale ou universelle exceptionnelle de leurs valeurs.

Paris, avril 2013